Les nouvelles frontières du voyage

Les nouvelles frontières du voyage

Parcourir le monde depuis son canapé, voyager moins loin et plus proche de la nature, partir à l’aventure en respectant la planète et ses habitants ou encore faire de l’espace sa nouvelle destination ? Si l’expérience du voyage se renouvelle et devient polymorphe, a fortiori depuis le Covid, nombreuses sont les opportunités à saisir pour les marques de tous secteurs

 

1. Le voyage par procuration pour les voyageurs paresseux

Covid oblige, nous avons dû, pendant un temps qui nous a semblé infiniment long, mettre au placard nos envies d’évasion au grand air. Que restait-il aux malheureuses âmes d’aventuriers pour voyager au-delà des quatre murs de leur salon ? Deux yeux, un nez, des oreilles et un palais !

Ainsi, ils ont pu :

– Voyager avec les yeux, en regardant par exemple Nomadland, un road trip émouvant qui plonge le spectateur en immersion dans la vie des nomades sur les routes d’Amérique ou en rêvassant à la fenêtre d’inconnus à l’autre bout du globe, via WindowSwap.

– Voyager avec l’odorat, en lisant sentant le city-guide olfactif Smell York de l’office du tourisme de York qui recense les odeurs caractéristiques de la ville (boulangeries, rues, théâtres, antiquités, jardins…), révélées une fois ses pages grattées.

– Voyager avec les oreilles, en déambulant dans les quartiers de la capitale française, grâce à la balade sonore en ligne proposée par le site Ecouter Paris ou en écoutant des stations de radios émettant en direct des quatre coins du monde, grâce à Radio Garden.

– Voyager avec les papilles, en dégustant des mets aux saveurs du monde, en commandant par exemple chez Papilles nomades – les plus curieux se seront laissés tenter par un menu évasion à la destination mystère – ou en allant tout simplement chez Picard découvrir leur large gamme de Cuisine du monde.

Quelques initiatives qui s’inscrivent dans la tendance : 

Privés de voyage à cause de la pandémie mondiale, nous avons ainsi pu expérimenter un nouveau genre de tourisme : le tourisme à distance. Une petite révolution qui a ouvert de nouvelles voies pour d’autres secteurs souhaitant satisfaire des attentes d’expériences à vivre depuis chez soi, pour plus de confort ou pour moins de dépense.

Alors pourquoi ne pas surfer sur les possibilités offertes par le digital et la réalité virtuelle pour démocratiser l’accès à la culture ou encore offrir une nouvelle expérience du divertissement ?

Certaines initiatives ont déjà vu le jour dans ce sens, permettant par exemple de (re-)découvrir en réalité virtuelle Notre-Dame-de-Paris avant et après l’incendie en attendant sa réouverture grâce au film Revivre Notre-Dame de FlyView, admirer les trésors archéologiques et des reconstitutions de la ville antique de Pompéi grâce à l’exposition immersive Pompéi au Grand Palais ou encore participer au premier festival de films virtuel Short Nite organisé par Fortnite dans l’un des mondes du jeu vidéo…

 

 

2. La micro-aventure pour les voyageurs amateurs de plaisirs simples et le voyage éco-responsable pour les voyageurs engagés

Si certains arrivent à se satisfaire d’une escapade par procuration, ce n’est pas le cas de tout le monde : rien ne remplace un vrai voyage… à l’autre bout du monde ou même au coin de la rue !

Depuis la pandémie, de nombreuses personnes ont en effet réinvesti les territoires à proximité de chez eux, le temps d’une parenthèse de quelques jours pour se reconnecter à soi et à la nature, en partant de la capitale pour une grande randonnée grâce au GR 75, le premier sentier de grande randonnée 100% parisien, créé et aménagé dans le cadre des J.O. de 2024, avant de planter leur tente en pleine nature ou chez l’habitant, à l’aide de la carte collaborative de Camping Sauvage qui recense des emplacements testés et approuvés. C’est le principe de la « micro-aventure », cette alternative au tourisme classique, qui met l’accent sur des destinations de plus en plus locales et rurales et sur des plaisirs simples qui ont été revalorisés par la pandémie : balade, découverte, dégustation, échange… Au total, c’est 57% de Français qui disent rechercher des expériences plus rurales et éloignées des sentiers battus, pour renouer avec la nature (Booking, 2020).

Avec ce changement d’échelle, la micro-aventure marque un premier pas vers les voyages éco-responsables. Voyager moins, mais mieux : c’est ce que souhaitaient déjà 47% des personnes interrogées dans l’étude « Future Travellers Tribe 2030 » en 2016, affirmant vouloir modifier leur manière de voyager en raison de leur sensibilité écologique. Un nouveau style de voyage renforcé par la crise sanitaire et économique qui a réuni toutes les conditions pour une prise de conscience écologique.

A la suite des destinations touristiques elles-mêmes – comme les Îles Féroé qui, pendant un week-end au printemps lors de l’opération « Fermé pour maintenance », restreignent l’accès à l’archipel à un groupe de volontaires qui viennent nettoyer ou aménager des sentiers de randonnée -, les voyageurs s’engagent pour continuer à découvrir le monde sans toutefois nuire à la planète. Ils peuvent par exemple compter sur la plateforme Flockeo qui combine des adresses écoresponsables et des informations sur la situation écologique des différentes régions du monde.

 

Quelques initiatives qui s’inscrivent dans la tendance :

Ces deux tendances de la micro-aventure et du voyage éco-responsable font état d’un recentrage sur la proximité au sens large (local, nature…), qui devient une valeur cardinale, et d’une préoccupation grandissante pour l’environnement, avec la volonté d’agir en sa faveur.

Les opportunités à saisir pour les marques de toutes catégories sont infinies, en prenant exemple sur celles qui ont déjà eu du flair : Crate & Kids, marque de décoration d’intérieur pour enfants, a créé une gamme de produits qui suscitent l’intérêt pour les animaux et le monde naturel ; Airbnb propose une catégorie Design et Nature qui regroupe des logements atypiques au cœur de la nature ; Staycation est un site qui permet de réserver une nuit dans un hôtel de luxe à prix cassé à deux pas de chez soi pour se sentir en vacances sans quitter sa ville de résidence…

Et que dire de l’agence de design lettone Zeltini qui a inventé le Z-nitron, né de la fusion d’un vélo, d’un bateau et d’une petite maison !

 

 

3. Le voyage transformationnel

Utiliser le temps des vacances pour améliorer ses capacités physiques et mentales pour devenir plus performant que jamais, ça vous tente ? Poussé à l’extrême, c’est le principe du voyage transformationnel : une expérience d’apprentissage et d’enrichissement personnel qui va bien au-delà de celle du voyage en tant que tel.

Ce type de vacances peu ordinaires a connu un regain d’intérêt depuis la crise sanitaire qui nous a rappelé combien notre bien-être, physique comme mental, est primordial.

Le voyage transformationnel peut se manifester de bien des façons :

– de la retraite de yoga ou voyage détox pour apprendre à lâcher prise et à se reconnecter à soi (en s’inspirant par exemple du Guide des lieux et expériences pour déconnecter en France conçu par Orange en partenariat avec Lonely Planet)

– … au séjour initiatique ou solidaire pour regarder le monde avec un œil neuf (grâce à des agences spécialisées comme Doublesens qui propose des séjours alliant tourisme et développement durable),

– en passant par les stages de survie pour sortir de sa zone de confort et se dépasser (avec l’aide de la Paleo Tracks Survival School dans le Colorado qui « enseigne à des personnes de différents horizons les compétences essentielles et nécessaires pour survivre et s’épanouir dans n’importe quelle situation »).

Si cette démarche peut toucher toutes les tranches d’âge, il semblerait qu’elle résonne tout particulièrement chez les jeunes générations pour qui le voyage est une opportunité de découverte et d’apprentissage. Chez les 18-24 ans, ils sont en effet 71% à déclarer que le voyage a déjà « inspiré des changements importants dans leur vie » (Booking, 2017).AE_Voyage_3

 

Quelques initiatives qui s’inscrivent dans la tendance : 

Le voyage transformationnel traduit de fait une tendance sociale plus large, marquée par un désir fort de retirer un impact personnel positif sur le long terme d’une expérience, vue comme un outil au service d’une véritable transformation intérieure.

Tous les secteurs proposant des expériences – événementiel, gaming, culture, sport, hôtellerie… – sont concernés et pourraient imaginer une nouvelle approche de l’expérience offerte ou un nouveau discours qui prendrait en compte ces nouvelles attentes, comme l’ont fait le Sarcus Festival qui est devenu le premier festival de musique à bannir officiellement les téléphones portables en 2018, avec pour mot d’ordre « la connexion aux autres, à l’inconnu, à soi-même » ou bien We Can Doo qui propose des ateliers avec des artisans pour apprendre en bénéficiant d’un vrai savoir-faire.

 

4. Le voyage spatial pour les voyageurs qui ont fait le tour de la planète Terre

Certains l’attendaient avec impatience : voyager dans l’espace est désormais possible une éventualité pour le commun des mortels !

2021 a en effet marqué le début des vols touristiques vers l’espace avec le premier vol spatial touristique de l’Histoire réalisé le 11 juillet dernier par l’entreprise américaine Virgin Galactic, suivi neuf jours plus tard par la firme de Jeff Bezos Blue Origin. L’entreprise d’Elon Musk, SpaceX, a quant à elle envoyé quatre touristes spatiaux pour trois jours autour de la Terre à la mi-septembre.

Quelques initiatives qui s’inscrivent dans la tendance : 

Si les trois milliardaires Richard Branson, Jeff Bezos et Elon Musk affirment vouloir « démocratiser les vols spatiaux touristiques », la réalité est toute autre et ce type de voyage est encore réservé à une élite.

Alors pourquoi ne pas aider les fans déçus à toucher du doigt leur rêve spatial… autrement ?

C’est ce que proposent déjà l’équipe de la brasserie américaine Ninkasi Brewing Company qui a mis au point une bière composée de levure ayant été envoyée dans l’espace, Steve Pearce qui, sous l’impulsion de la NASA, a créé un parfum qui reproduit l’odeur de l’espace afin que les astronautes s’entraînent dans des conditions les plus réelles possibles ou encore Nike qui a lancé Space Hippie, une collection exploratoire de chaussures inspirées de la vie sur Mars.

Il paraîtrait même qu’un projet d’émission de téléréalité avec des candidats à bord de la Station spatiale internationale serait en cours chez la maison de production américaine Space Hero !

 

Sévan Sauvaget, planneur stratégique

 

2560 1707 France